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Le Renseignement militaire français dans la guerre froide

 

 

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 Les pays de l'Europe de l'Est durant la guerre froide

 

 Par Jean-Paul Huet et Patrick Manificat

 

 

Les services militaires français de renseignement ont connu une constante évolution durant les 45 années de la guerre froide en fonction de la menace que faisait peser l’URSS sur l’Europe, mais aussi en fonction des évolutions politico-militaires de la France.

 

Jusqu’à la fin des années 40 la France est plus préoccupée par la possible résurgence d’une menace allemande et par le conflit indochinois que par la menace que font peser les Soviétiques. Au-delà du rideau de fer, la recherche du renseignement relève alors davantage de la responsabilité du SDECE[1], à l’époque fortement militarisé.

 

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 Insigne actuel de la Direction du renseignement militaire.

( La DRM est née en 1992 de la fusion des bureaux de renseignement des armées et du Centre d’exploitation du renseignement militaire.)

 

Ce n’est qu’après la crise du blocus de Berlin de 1948-49 que la menace du Pacte de Varsovie devient une priorité du renseignement militaire français. A celle-ci s’ajoute, au début des années 60, la recherche du renseignement au profit de la «Force de frappe» nucléaire. Après la sortie de la France des structures intégrées de l’OTAN en 1966, le besoin de disposer de sources nationales orientées vers l’avant-garde des armées du Pacte de Varsovie stationnées dans la Zone Satellite Avancée (ZSA)[2] se renforce. D’autant plus que la qualité et la quantité des échanges de renseignements entre membres de l’Alliance est fortement conditionnée par celles des informations de source nationale, qui assoient leur crédibilité.

 

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Insigne de l'OTAN


Au fil des ans, des stations de recueil du renseignement d’origine électromagnétique sont installées le long du rideau de fer et à Berlin, dont la situation à l’est de la RDA constitue à cet égard un remarquable «poste d’observation et d’écoute». De plus, les 3 couloirs aériens d’accès à cette ville sont régulièrement parcourus par des avions de reconnaissance aussi bien photographique qu’électromagnétique.

 

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Hoher Bogen - Vigie de la Guerre froide - Tour d'écoute de Goslar  (3)

 

C’est aussi à cette époque que l’organisation du renseignement militaire français est profondément modifiée et décentralisée. Le commandement des forces françaises en Allemagne à Baden-Baden (CCFFA), dont dépendait hiérarchiquement la MMFL, se voit confier par les services centraux parisiens la responsabilité de l’exploitation du renseignement sur les forces terrestres stationnées en RDA et en Tchécoslovaquie. Parallèlement, le commandement de la Force aérienne tactique à Metz (FATAC) reçoit la même responsabilité pour les forces aériennes de toute la Zone Satellite Avancée. Ces deux commandements, intéressés au premier chef par la menace de « leur » ennemi potentiel, ont alors le contrôle direct de l’activité opérationnelle de la MMFL.

 

La recherche sur le terrain du renseignement militaire en Allemagne de l’Est, qui est devenue la responsabilité de la seule MMFL, connait elle aussi au début des années 60 un changement radical avec la professionnalisation des équipages  et la modernisation de ses équipements et de ses voitures. De plus la coopération étroite  avec les deux autres missions, britannique et américaine, a non seulement un effet multiplicateur d’efficacité, mais il confère aussi au renseignement français une  forte crédibilité dans les échanges avec ses partenaires majeurs, comme les services de renseignement allemands de la RFA.

 

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Plaques d'immatriculation et insignes des trois Missions de Potsdam

BRIXMIS - MMFL- USMLM

 

Dans ce contexte, sillonnant en permanence l’Allemagne de l’Est, observant et scrutant leur adversaire du moment de jour comme de nuit et par tous les temps, voyant ce que les satellites et les avions ne pouvaient voir, voyant aussi ce que les « écoutes » ne pouvaient déceler, confirmant ou infirmant les informations en provenance d’autres sources¸ suivant attentivement les mouvements et les exercices d’unités, surprenant l’apparition des nouveaux matériels et détectant les indices d’alerte, les membres de la MMFL et des deux missions alliées transmettaient l’image la plus fidèle qui soit de la menace qui pesait sur l’Europe, car ils en observaient tous les jours les forces et les faiblesses.

 

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Vue aérienne d'une garnison soviétique près de Potsdam, prise par un observateur de la MMFL

 

Malgré toutes les imperfections du système français d’exploitation du renseignement militaire sur les forces conventionnelles en Europe pendant la guerre froide (priorité à la dissuasion nucléaire, désintérêt relatif du commandement, cloisonnement des services, faiblesse des moyens, lenteur des réactions, etc.) la France a tenu son rang dans l’évaluation par l’Alliance de la menace soviétique en Centre-Europe. Ceci est dû en grande partie à la place que la MMFL a occupée dans la recherche humaine du renseignement militaire en Allemagne de l’Est.

 

Les informations nombreuses, précises, prouvées et pertinentes qu’elle a fournies, faisaient oublier la faiblesse de ses effectifs et la vulnérabilité de ses membres. Ces derniers ont ainsi prouvé que l’homme occupe une place unique et irremplaçable dans la chaîne du Renseignement, ce qui conserve aujourd’hui encore toute sa pertinence.

 

Jean-Paul Huet Général (cr) chef de Mission de la MMFL, 1983-1986

 

Patrick. Manificat Général ( cr) commandant en second de la MMFL, 1982 -1985

 



[1] Cf. Glossaire en annexe.

[2] La ZSA comprenait, outre les forces nationales des pays la composant, 4 groupes de forces soviétiques : le Groupe des Forces Soviétiques en Allemagne (GFSA puis GFO) en RDA, le Groupe des Forces Nord (GFN) en Pologne, le Groupe de Forces Centre (GFC) en Tchécoslovaquie et le Groupe de Forces Sud (GFS) en Hongrie. Les capacités militaires du GFSA étaient environ trois fois supérieures au total de celles des 3 autres groupes de forces.

 (3) L'Escadron Electronique Sol 03.054 de Goslar  : http://judrand.com/Tulipe/07-ees_03054.html



07/10/2019
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