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Introduction :

Lors l’ AG 2024 de notre Amicale l’AAMMFL  se déroulant à BEZIERS ( lire sur notre Blog  « secrets de la Guerre Froide » l’article du 17/10/2024 : « 40ème anniversaire de l’assassinat de l’Adjudant-Chef Philippe MARIOTTI par la Stasi »), un témoignage très intéressant a été recueilli par notre camarade Serge, auprès de l’un de ses amis, Monsieur Dominique.Billotet. ; celui-ci, en 1968, était Sous-Lieutenant à Berlin au sein d’un régiment du Quartier Napoléon. Dans ses fonctions il assurait le commandement de patrouilles françaises dans la zone soviétique de Berlin où n’opéraient pas les trois Missions Militaires Alliées de Potsdam. Des « Missionnaires » opéraient parfois à Berlin-Est mais sous couvert de leur statut de militaires alliés stationnant à Berlin. C’était notamment le cas lors des défilés militaires marquant les anniversaires de la création de la RDA, lors de grandes manœuvres ou lors d’événements particuliers. Une excellente coopération et coordination existait entre le Deuxième Bureau du Quartier Napoléon et la MMFL.

(Ecusson de manche des affectés au Quartier Napoléon et écusson de manche des membres de la MMFL)

Entrée principale du Quartier Napoléon

Récit du S/Ltt D.B :

« J’étais sous-lieutenant à Berlin et je faisais de nombreuses "patrouilles" à Berlin Est. Quand j'allais rendre compte de mes missions au "Palais" du Gouverneur il m'arrivait de croiser des membres de la MMFL. Mais c'est surtout le mercredi 21 août 1968 que j'ai pu discuter rapidement avec eux. J'étais de patrouille en début de soirée quand mon attention fut attirée par de nombreux véhicules des corps diplomatiques de l'Europe de l’Est. Les prenant en filature je vis qu'ils se rendaient au Ministère des Affaires Étrangères de l'Allemagne de l'est.

Je notais sur mon carnet de route ce que j'avais constaté. Mais la nuit venue ma mission n'étant pas terminée je fis le tour de certaines gares de chemin de fer. Et sur l'une je vis un train très long avec que des chars dessus. Il y avait à Berlin Est, au moins, si mes souvenirs sont bons, deux régiments de chars. Je descendis de voiture à un bon endroit et accompagné de mon passager, un sergent, je me dirigeais vers ce train. Aucune lumière, aucun bruit, personne. J'allais vers le premier wagon en me disant que si c'était comme en France, il devait y avoir un document apposé sur le wagon mentionnant la destination. Mon sergent et son briquet me permirent de recopier lettre après lettre ce document écrit en russe.

Les indications d’origine et de destination du wagon

 Nous rejoignîmes vite fait la voiture et nous rentrâmes rapidement  au quartier Napoléon. Je fis au bureau de l'officier de permanence du secteur français, contigu au secrétariat du Gouverneur, mon CR par écrit, avec copie du document copié.

Une fois fini je rentrai avec la voiture de patrouille dans mon appartement où m'attendaient ma femme et les enfants. Au bout d'une heure, après avoir diné j'allais me reposer sur un canapé. Le téléphone sonna et me femme alla répondre. A l'autre bout du fil lui fut demandé que je prenne le téléphone. "Bonsoir, c'est le général, venez immédiatement à mon bureau, la voiture est en route pour vous prendre. Quelques minutes plus tard un planton me dirigea vers une porte "secrète". E je fus alors face au général. Qui me tendit la main et dit alors "félicitation pour votre patrouille et pour votre CR. Suivez-moi. J'entrais alors dans la grande salle du conseil laquelle était archi pleine de civils, de colonels, d'anglais, américains. Puis il annonça à tous que c'était grâce à moi qu'ils devaient ce qu'il leur avait exposé peu avant. Tonnerre d'applaudissements puis le général me ramena dans son bureau Je me permis alors de lui demander pourquoi tout cela, il me dit alors que les renseignements que j'avais eus complétaient ceux de la MMFL qui savait, mais pas tout… 

Il me dit alors : comme tous ici, vous écoutez France-Inter émis depuis le relais situé chez les gendarmes. Alors à votre réveil avant 6 heures 30 écoutez les infos. A l'heure dite, France-Inter annonça que dans la nuit avait eu lieu l'invasion de la Tchécoslovaquie ».

Commentaires :

Grâce à sa perspicacité et son « culot » digne d’un « Missionnaire », le Sous-Lieutenant D.B venait ainsi d’obtenir deux renseignements importants en période sensible et pouvant être considérés comme des « indices d’alerte » de haut-niveau:

-       L’effervescence des milieux diplomatiques représentants les pays du Pacte de Varsovie à Berlin-Est,

-       La participation probable d’éléments de la NVA (Armée Est-Allemande) à cet événement majeur en Europe.

Dans le domaine du renseignement, aucun indice, aucun élément ne doit être négligé. Le « Renseignement » est un puzzle où  chaque pièce a son importance, le témoignage du Sous-Lieutenant D.B en est une belle et très intéressante illustration.

Lors d’observation de ce type par les patrouilles d’éléments du Quartier Napoléon , le Deuxième Bureau de Berlin en informait la MMFL ( ces échanges se faisaient bien évidemment dans les deux sens). La MMFL déclenchait alors une mission pour surveiller les voies ferrées sortant de Berlin-Est et tenter d’observer la direction prise par ces trains de matériels de la NVA, l’Armée Est-Allemande.

Des chars à Prague

Le Président de l’AAMMFL

Jacques Suspène